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L’antique droit des employeurs de poursuivre persiste malgré le régime d’assurance sans faute

Deux décisions récentes de tribunaux ontariens ont établi clairement que malgré le fait qu’en vertu du régime d’assurance automobile sans faute de la province une personne blessée dans un accident automobile ne peut poursuivre pour dommages-intérets, les employeurs peuvent néanmoins recouvrer les salaires versés aux employés blessés pendant leur absence. Il s’agissait dans les deux cas d’établir si les dispositions relatives a la protection sans égard a la faute de la Loi sur l’assurance empechaient l’employeur d’intenter une action per quod servitium amisit.

L’action per quod se fonde sur le droit du « maître », reconnu en common law, d’etre dédommagé de la perte des services de son « serviteur » par le responsable de l’incapacité de ce dernier. Cela se traduit aujourd’hui par le droit de l’employeur de poursuivre pour recouvrer le salaire versé a l’employé accidenté. Bien qu’on reconnaisse généralement en Ontario que ce droit existe toujours, on ne savait trop quel serait l’effet du régime de compensation sans égard a la faute, en vertu de la Loi sur l’assurance, sur l’action per quod.

Dans la premiere affaire, Attorney General of Canada v. Kerr (30 mai 1997), un membre de l’armée canadienne a été blessé dans un accident d’auto et payé pres de 4 700 dollars pour la période ou il ne pouvait se présenter au travail. Son employeur, le gouvernement fédéral, a tenté de recouvrer ce montant, mais l’action a été rejetée par la cour des petites créances, pour le motif que cette demande n’était pas permise aux termes de la Loi sur l’assurance.

La Cour divisionnaire a cependant donné raison a l’employeur lors de l’appel. La Cour a concédé qu’il ne pouvait y avoir d’action per quod s’il n’y avait pas eu de comportement fautif. Toutefois, a déclaré la Cour, la Loi sur l’assurance n’éliminait pas le caractere fautif du comportement, mais ne faisait que mettre a l’abri l’auteur du préjudice d’une poursuite éventuelle par la victime de l’accident. Le fait que le comportement demeurait fautif maintenait le droit de l’employeur de poursuivre.

Dans l’affaire Schittone v. George Minkensky Ltd. (29 septembre 1997), le défendeur a soutenu que l’article 267(4) de la Loi sur l’assurance, qui éliminait le droit de subrogation de ceux qui étaient obligés d’indemniser les victimes d’accidents automobiles, éliminait également le droit de l’employeur d’intenter une action per quod. L’employé, dans cette affaire, avait perçu son salaire directement de l’employeur alors qu’il ne travaillait pas, et non pas en vertu d’un régime d’assurance ni d’un contrat d’indemnisation.

Le tribunal a tranché en faveur du plaignant, et déclaré qu’une loi qui abroge un droit existant doit le faire de façon expresse. Ici, l’employeur ne revendiquait pas le droit de poursuivre par subrogation, et il n’y avait aucune intention claire d’abolir l' »antique droit » d’intenter une action per quod :

[TRADUCTION] « Le droit de l’employeur de recouvrer ses argents est le sien. La subrogation n’a rien a voir avec ce droit. …Dans le présent cas, l’employeur a souffert directement de la perte des services de l’employé, et il a droit a ce que la valeur de ces services soit payée par l’auteur de la faute, si la blessure a été causée par une faute du défendeur. »

Pour de plus amples renseignements, veuillez communiquer avec André Champagne au (613) 563-7660, poste 229.