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La CSC se prononce sur l’instruction en français à une école de Vancouver – les enfants ne bénéficient pas de l’instruction garantie par la Charte

Le 24 avril 2015, la Cour suprême du Canada a rétabli un jugement déclaratoire de la cour de première instance selon lequel les parents d’enfants fréquentant une école de langue française de Vancouver ne bénéficiaient pas d’installations d’enseignement équivalentes aux écoles de la majorité linguistique, comme le garantit l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte).

L’article 23 impose aux provinces et territoires l’obligation constitutionnelle d’offrir l’instruction dans la langue de la minorité aux enfants des titulaires des droits garantis par l’article 23 là où le nombre le justifie. La Cour suprême a auparavant expliqué dans l’arrêt Mahe c. Alberta, [1990] 1 R.C.S. 342, que l’article 23 garantit une « échelle variable » de droits à l’instruction dans la langue de la minorité. À la limite supérieure de l’échelle variable, le nombre justifie la fourniture du plus haut niveau de services à la communauté linguistique minoritaire. Dans un tel cas, les ayants droit doivent bénéficier d’établissements d’enseignement complets, distincts de ceux offerts à la majorité linguistique, mais de qualité équivalente. Ces établissements doivent être accessibles et situés, si possible, dans la collectivité où habitent les enfants. Le niveau supérieur de l’échelle variable prévoit également la création de conseils scolaires séparés pour la minorité linguistique.

Les arrêts antérieurs relatifs à l’article 23 portent principalement sur le niveau de services auxquels avaient droit les titulaires de droits. Cette question n’était toutefois pas devant la Cour suprême dans l’affaire Association des parents de l’école Rose-des-vents c. Colombie-Britannique (Éducation), les parties ayant convenu que les ayants droit avaient droit au plus haut niveau de services. La Cour suprême était plutôt appelée à décider l’approche analytique qui détermine s’il y a ou non équivalence aux termes de l’article 23.

La Cour suprême a déclaré que cette détermination reposait sur la question de savoir si les parents seraient dissuadés d’envoyer leurs enfants dans une école de la minorité linguistique parce que l’école est véritablement inférieure aux écoles de la majorité linguistique avoisinantes où ils peuvent les inscrire. Si les parents sont ainsi dissuadés, ceci risque d’entraîner l’assimilation, et telles circonstances portent atteinte aux droits que garantit l’article 23.

Pour situer les choses dans leur contexte, il faut mentionner que l’école primaire Rose-des-vents est la seule école primaire de langue française financée à même les fonds publics desservant les enfants résidant à l’ouest de la rue Main à Vancouver. L’école est très petite et surpeuplée, ses salles de classe sont beaucoup plus petites, elle manque d’espace d’entreposage, sa bibliothèque est très petite et ses salles de toilette sont inadéquates. Environ 85% des élèves se rendent à l’école en autobus et le trajet en autobus de la majorité dure plus de 30 minutes.

En 2010, l’association des parents d’enfants qui fréquentent l’école ont poursuivi la province et le conseil scolaire en vue d’obtenir un jugement déclarant que les installations d’enseignement offertes à leurs enfants n’étaient pas équivalentes à celles des écoles de langue anglaise du secteur et que les droits à l’instruction dans la langue de la minorité que leur confère l’article 23 de la Charte avaient donc été violés. Les parents ont eu gain de cause en première instance, mais le jugement déclaratoire a été annulé en appel.

La Cour suprême a conclu que le juge de première instance avait correctement appliqué le critère susmentionné. La Cour a fait remarquer que l’exercice comparatif dans l’évaluation de l’équivalence est de nature contextuelle et holistique, tenant compte non seulement des installations matérielles, mais aussi de la qualité de l’instruction, des résultats scolaires, des activités parascolaires et du temps de déplacement. La Cour était d’avis qu’il n’était pas opportun pour les gouvernements provinciaux ou territoriaux de soulever des questions liées aux considérations pratiques ou aux coûts dans le cadre de l’analyse de l’équivalence. La Cour a convenu avec le juge de première instance que même si l’école offrait une qualité d’éducation supérieure et que les résultats scolaires étaient bons, cela ne palliait pas le caractère inadéquat des installations de l’école, la surpopulation et les longs déplacements. Comparativement aux écoles de langue anglaise avoisinantes, qui constituaient selon la Cour le groupe de comparaison approprié, l’écart en résultant aurait pour effet de limiter l’inscription. Les parents choisiraient plutôt l’école de langue anglaise, de sorte qu’il y aurait entrave à la réalisation des droits garantis par l’article 23 et que cela contribuerait en définitive à l’assimilation.

La Cour suprême a donc rétabli le jugement déclaratoire du juge de première instance selon lequel il y a eu atteinte aux droits garantis par l’article 23. L’affaire a été renvoyée à la Cour suprême de la Colombie-Britannique pour l’étape suivante du litige, si nécessaire, pour qu’elle détermine qui, du conseil scolaire ou de la province, était responsable de la violation.

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