Congés spéciaux et ententes de dérogation en vertu de la LNE 2000 : de nouvelles variables dans le monde de l’emploi

Deux aspects de la Loi de 2000 sur les normes d’emploi (voir « CongĂ© parental, règles relatives aux heures supplĂ©mentaires parmi les principaux changements Ă  la nouvelle Loi sur les normes d’emploi«  sous la rubrique « Publications Â») ont soulevĂ© un intĂ©rĂŞt considĂ©rable : les dispositions sur les congĂ©s spĂ©ciaux et celles qui prĂ©voient la possibilitĂ© pour les employeurs et les employĂ©s de s’entendre pour dĂ©roger aux normes d’emploi lĂ©gislatives. Nous examinons ici de plus près ces deux aspects du droit ontarien de l’emploi.

ENTENTES DE DÉROGATION : GÉNÉRALITÉS

Sous réserve d’une disposition contraire, les ententes de dérogation sont écrites. Cette règle s’applique à la plupart des ententes visées par la loi, mais non – exception de taille – au contrat de travail lui-même, à moins qu’il ne s’agisse d’une convention collective. Lorsque le syndicat qui représente un employé convient avec l’employeur de déroger à une norme d’emploi, l’entente lie l’employé. Le ministère du Travail signale qu’une entente constatée sur support électronique remplit l’exigence de l’écrit, mais n’est valide que si l’employé a manifesté concrètement son assentiment.

Le Ministère indique qu’il faut tenir compte d’un certain nombre de facteurs pour établir si une entente est applicable, notamment, des facteurs suivants :

  • l’entente a une portĂ©e rĂ©troactive. En règle gĂ©nĂ©rale, l’entente ne devrait viser que des Ă©vĂ©nements futurs. Cependant, dans un nombre très restreint de cas, il est possible qu’une entente ait un effet rĂ©troactif;
  • les parties ont signĂ© l’entente;
  • les modalitĂ©s de l’entente sont claires et prĂ©cises;
  • l’employĂ© a compris les consĂ©quences de la conclusion de l’entente;
  • l’employĂ© a Ă©tĂ© forcĂ© Ă  conclure l’entente.

On peut éviter les conséquences qu’entraînerait le défaut de prise en considérations des facteurs ci-haut énumérés en s’assurant que les ententes comportent les éléments suivants :

  • les noms des parties;
  • la date de conclusion de l’entente;
  • la date d’entrĂ©e en vigueur de l’entente;
  • la date d’expiration de l’entente;
  • la norme d’emploi Ă  laquelle l’entente dĂ©roge et les conditions qui la remplacent;
  • la signature de chaque partie Ă  l’entente.

ENTENTES PERMISES

La loi prévoit de nombreux types d’entente, notamment les ententes suivantes :

  • dĂ©passer les heures de travail quotidiennes ou hebdomadaires jusqu’à concurrence de 60 heures par semaine (ou plus de 60 heures, avec l’approbation du Directeur);
  • accorder moins de huit heures d’inactivitĂ© entre deux postes;
  • accorder deux pauses-repas d’une durĂ©e totale de 30 minutes par pĂ©riode de cinq heures consĂ©cutives, plutĂ´t qu’une pause-repas de 30 minutes (cette entente peut ĂŞtre Ă©crite ou non);
  • Ă©tablir la moyenne des heures de travail sur une pĂ©riode maximale de quatre semaines aux fins de l’établissement du droit Ă  la rĂ©munĂ©ration des heures supplĂ©mentaires (ou sur une pĂ©riode de plus de quatre semaines, avec l’approbation du Directeur);
  • compenser un employĂ©, pour des heures de travail supplĂ©mentaires effectuĂ©es, par des congĂ©s payĂ©s au lieu d’une rĂ©munĂ©ration, dans les trois mois qui suivent la semaine de travail pendant laquelle l’employĂ© a fait les heures supplĂ©mentaires ou, sur entente, dans les douze mois qui la suivent;
  • prĂ©voir qu’un employĂ© qui n’est pas tenu de travailler pendant un jour fĂ©riĂ©, travaille le jour fĂ©riĂ© et soit (a) payer l’employĂ© son salaire ordinaire et lui accorder un jour de congĂ© payĂ© dans les trois mois, ou si les parties en conviennent, dans les douze mois, soit (b) si les parties en conviennent, verser Ă  l’employĂ© son salaire pour le jour fĂ©riĂ© plus le taux majorĂ© pour chaque heure travaillĂ©e;
  • offrir des vacances d’une pĂ©riode de moins d’une semaine (remarque : cette entente doit ĂŞtre demandĂ©e par Ă©crit par l’employĂ©);
  • verser l’indemnitĂ© de vacances qui s’accumule pendant une pĂ©riode de paie le jour de paie, ou Ă  un moment convenu;
  • permettre Ă  l’employĂ© de renoncer Ă  ses vacances, avec l’approbation du Directeur; et
  • payer l’indemnitĂ© de dĂ©part due Ă  l’employĂ© par paiements Ă©chelonnĂ©s, sur une pĂ©riode ne dĂ©passant pas trois ans.

CONGÉ SPÉCIAL

Cette nouvelle disposition permet à l’employé qui travaille pour un employeur qui emploie normalement au moins 50 employés de prendre jusqu’à 10 jours de congé non payés par année pour l’une de raisons suivantes :

  • maladie, blessure ou urgence mĂ©dicale personnelles;
  • dĂ©cès, maladie, blessure, urgence mĂ©dicale touchant des particuliers dĂ©finis;
  • situation urgente touchant des particuliers dĂ©finis.

Les particuliers définis comprennent des personnes telles que le conjoint de l’employé, son partenaire de même sexe, un parent proche ou dépendant.

À la fin du congé spécial, l’employé a le droit d’être réintégré dans son poste le plus récent, s’il existe encore, ou sinon dans un poste comparable.

Le Ministère donne des indications sur la façon dont il convient d’interpréter certaines des expressions utilisées dans les dispositions sur le congé spécial :

« Emploie normalement au moins 50 employĂ©s Â»

Puisqu’il s’agit d’un prĂ©alable pour obtenir le congĂ© spĂ©cial, il est important de savoir comment cette expression sera interprĂ©tĂ©e. D’après le Ministère, on satisfait Ă  l’exigence si l’employeur a employĂ© « au moins 50 employĂ©s pendant au moins la moitiĂ© de la plus rĂ©cente annĂ©e civile, sous rĂ©serve de modifications plus ou moins permanentes du nombre d’employĂ©s pendant l’annĂ©e civile en cours Â».

Par conséquent, si, dans une année donnée, un employeur réduit ses effectifs de façon permanente et compte désormais moins de 50 employés, le droit au congé spécial pour cette année-là peut dépendre du moment de l’année où a lieu la réduction d’effectifs. Si celle-ci se produit au début de l’année, les employés pourraient perdre leur droit au moment où elle se produit. Si la réduction d’effectifs se produit tard dans l’année, les employés gardent leur droit, parce que plus de 50 employés auront été employés pendant six mois de l’année.

Personnes considĂ©rĂ©es comme des « employĂ©s Â»

Tous les employés doivent être comptés afin de déterminer le seuil de 50 employés, y compris les travailleurs à domicile, les travailleurs à temps partiel, les employés en probation, et les employés mis à pied, en grève ou en lock-out. Un employé à temps partiel est compté comme un employé, et si l’employeur exploite une entreprise à plus d’un endroit en Ontario, tous les employés doivent être compris dans le calcul.

« Maladie, blessure ou urgence mĂ©dicale Â»

La « maladie Â» comprend les chirurgies prĂ©vues ou facultatives, si elles sont effectuĂ©es pour prĂ©venir ou traiter un Ă©tat sous-jacent. MĂŞme si le problème de santĂ© dĂ©coule d’une action propre de l’employĂ©, l’employĂ© aura quand mĂŞme droit au congĂ© spĂ©cial.

« Situation urgente Â»

Il s’agit d’une situation « qui n’est pas prĂ©vue ou est indĂ©pendante de la volontĂ© de l’employĂ© et qui comprend la possibilitĂ© de consĂ©quences nĂ©gatives graves, y compris des blessures Ă©motives, si la situation n’est pas prise en charge. Le critère consiste Ă  dĂ©terminer si une personne raisonnable se trouvant dans la situation de l’employĂ© estimerait qu’il s’agit d’une situation urgente Â». [italiques dans l’original]

« Parent de l’employĂ© qui dĂ©pend de ses soins ou de son aide Â»

« Parent Â» est dĂ©fini au sens large, et comprend le partenaire de sexe opposĂ© ou de mĂŞme sexe; la relation de « parentĂ© Â» s’établit dans ce cas « lorsqu’il y a une relation conjugale, peu importe la durĂ©e de celle-ci Â».

Un parent est considĂ©rĂ© comme « dĂ©pendant Â» lorsqu’il compte sur l’employĂ© dans une certaine mesure pour recevoir des soins ou de l’aide afin de satisfaire ses besoins essentiels. En outre, la situation pour laquelle l’employĂ© demande un congĂ© spĂ©cial n’a pas Ă  ĂŞtre reliĂ©e au type de dĂ©pendance du parent envers l’employĂ©.

Notre point de vue

Il est important de mentionner l’interaction entre le congé spécial et les modalités du contrat de travail. Ces dernières ont préséance lorsqu’elles sont plus avantageuses pour l’employé. Dans certains cas, on reconnaît facilement quelles dispositions sont plus favorables à l’employé – par exemple, lorsque le contrat ou la convention collective prévoit dix jours de congé payés pour toutes les situations prévues dans les dispositions sur le congé spécial dans la Loi.

Toutefois, le Ministère indique aussi que si l’employĂ© n’a droit qu’à 10 jours de congĂ© de maladie payĂ©s, et qu’il les utilise, il ne pourra avoir recours aux dispositions sur le congĂ© spĂ©cial pour d’autres fins, tel un congĂ© de deuil. MĂŞme si le congĂ© de maladie ne couvre pas toutes les Ă©ventualitĂ©s du congĂ© spĂ©cial, l’employĂ© a reçu, en prenant 10 jours de congĂ© payĂ©s, un avantage plus important aux termes du contrat qu’aux termes de la Loi, c’est-Ă -dire, 10 jours de congĂ© payĂ©s pour maladie personnelle, par opposition Ă  10 jours de congĂ© non payĂ©s pour des situations qui comprennent entre autres la maladie personnelle. (Voir aussi « Le gouvernement dĂ©pose des modifications Ă  la Loi sur les normes d’emploi«  sous la rubrique « Publications Â»).

Pour de plus amples renseignements, veuillez communiquer avec Sylvie Guilbert au (613) 563-7660, poste 256, ou avec André Champagne au (613) 563-7660, poste 229.

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