Amende de 100 000 $ imposée à la première société condamnée pour négligence criminelle à cause d’une perte de vie en milieu de travail

Le 17 mars 2008, un tribunal au Québec a imposé une amende de 100 000 $ a l’usine de fabrication Transpavé Inc., premiere entreprise condamnée pour négligence criminelle a cause d’un déces en milieu de travail en vertu des dispositions du projet de loi C 45 modifiant le Code criminel. L’amende que le tribunal a imposée dans l’affaire R. c. Transpavé Inc. (le 17 mars 2008) est la premiere du genre au Canada et conclut les délibérations contre l’usine de fabrication au Québec.

MODIFICATIONS DU PROJET DE LOI C 45

Est ce que les lecteurs de AuPoint se rappellent du projet de loi C 45 de 2004 modifiant le Code criminel? La sécurité en milieu de travail releve maintenant de l’application du droit pénal, mais le régime réglementaire habituel de la SST s’applique toujours. Les modifications du Code criminel imposent une nouvelle obligation aux particuliers et organismes qui doivent prendre des mesures raisonnables pour empecher les préjudices corporels a ceux qui s’engagent dans une activité en milieu de travail.

Si un particulier ou un organisme ne respecte pas cette obligation ou néglige la sécurité des travailleurs ou des consommateurs, des inculpations peuvent etre portées et ils peuvent etre condamnés en définitive en vertu du Code criminel pour négligence criminelle ayant causé un préjudice corporel ou la mort, selon les circonstances.

Afin d’établir la négligence criminelle en général, l’inculpé doit avoir l’obligation ou le devoir légal d’intervenir d’une façon en particulier et négliger ou omettre de le faire. La négligence ou l’omission doit démontrer une « insouciance déréglée ou téméraire » a l’égard de la vie ou de la sécurité des autres.

Selon les modifications du projet de loi C 45, lorsqu’il y a lésion ou perte de vie en milieu de travail, une société peut etre condamnée pour négligence criminelle causant un préjudice corporel ou la mort s’il est prouvé qu’un représentant de la société a eu un comportement qui révele une négligence criminelle (décrite ci dessus) et que les dirigeants ou la direction de la société n’a ou n’ont pas corrigé la situation ultérieure. (Pour une considération plus détaillée du projet de loi C 45, consultez les « Modifications au Code criminel pour accroître la responsabilité pénale des organisations » a la page Publications).

INCULPATIONS ET PROCES

L’accident qui a suscité les inculpations de société au criminel portées contre Transpavé a eu lieu en octobre 2005 lorsqu’une machine lourde a écrasé un jeune employé qui a tenté de débloquer une empileuse. La Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST), organisme provincial chargé de l’application des reglements sur la sécurité en milieu de travail, ainsi que le Service de police, ont fait une grande enquete sur l’accident et déterminé que les éléments suivants, notamment, ont contribué a l’accident :

  • La machine était munie d’un dispositif de sécurité ou d’un systeme de protection, mais il était hors service au moment de l’accident et il l’était habituellement pendant les deux ans précédant la perte de vie.
  • L’entreprise n’avait pas de programme approprié pour garantir le fonctionnement du dispositif de sécurité.
  • L’entreprise n’a pas donné de formation appropriée de sensibilisation a la sécurité et aux dangers et n’a pas appliqué de procédures pour considérer les dangers. L’employé n’était donc pas conscient des dangers liés a ses actions.

Meme si elle a indiqué au départ qu’elle se défendrait contre les inculpations, Transpavé a plaidé coupable en décembre 2007. A l’audience de détermination de la peine en février 2008, les procureurs de la poursuite et de l’entreprise condamnée ont suggéré au tribunal qu’une somme de 100 000 $ serait une amende appropriée a l’infraction. Ce genre de présentation concertée est relativement habituel a l’étape de la détermination de la peine pendant un proces et reflete habituellement un montant que les parties ont négocié quand l’inculpé convient de plaider coupable.

La somme de 100 000 $ recommandée a été déterminée compte tenu de divers éléments, y compris la taille relativement modeste de l’entreprise (environ 100 employés) et les investissements importants de l’entreprise pour améliorer la sécurité apres la perte de vie (plus de 500 000 $). Le tribunal devait aussi considérer que Transpavé a plaidé coupable, ce qui épargnera a la famille de la victime et a ses collegues de travail un long proces qui s’éterniserait.

Le tribunal n’est pas obligé d’accepter le montant recommandé, surtout si la recommandation va a l’encontre de l’intéret public, mais il a rendu sa décision et accepté la présentation concertée au montant de 100 000 $.

Transpavé doit aussi régler une amende supplémentaire ou compensatoire de 10 000 $ en vertu de l’article 737 du Code criminel. L’amende compensatoire est une pénalité monétaire qui s’ajoute a l’amende ou la peine imposée. Les provinces utilisent l’argent pour financer divers programmes d’aide et de services aux victimes de la criminalité.

A notre avis

Meme si c’est la premiere condamnation du genre, l’amende imposée a Transpavé indique un plus grand risque pénal pour les particuliers et organismes en vertu du Code criminel lorsqu’il y a contravention aux reglements sur la santé et la sécurité au travail. Une pénalité de 110 000 $ ne serait pas lourde pour une condamnation a cause d’une perte de vie en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité au travail de l’Ontario, mais l’amende est considérable au Québec et a été déterminée selon la taille modeste de l’entreprise. Les plus grands organismes peuvent prévoir des amendes beaucoup plus lourdes dans des situations semblables. Afin de réduire le risque, les organismes doivent faire une surveillance appropriée de la conformité aux reglements sur la SST. Les organismes devraient appliquer des programmes d’inspection pour garantir le fonctionnement des mécanismes de sécurité et l’application de procédures qui considerent suffisamment les dangers présents en milieu de travail. Les organismes doivent faire la prestation de la formation appropriée de sensibilisation a la sécurité et aux dangers que la direction doit examiner et évaluer.

Pour information, veuillez communiquer avec Sébastien Huard en composant le (613) 940 2744.

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