La Cour divisionnaire confirme la décharge et rejette les demandes dans le cas d’une plainte d’équité salariale

Peut-on faire observer une décharge interdisant a un employé de poursuivre un employeur, meme si ce dernier a enfreint la loi aux termes de laquelle l’employé le poursuit ? Selon un comité de la Cour divisionnaire de l’Ontario, la réponse est « oui ».

Dans l’affaire Better Beef Ltd. v. MacLean (31 mai 2006) une employée ayant cessé d’exercer son emploi a essayé de déposer une plainte aupres de la Commission de l’équité salariale. Au moment de quitter son emploi, l’employée a signé une décharge par laquelle elle convenait de n’entreprendre aucune poursuite, de quelque nature que ce soit, contre l’employeur. En échange de cette décharge, l’employé a reçu huit semaines de salaire tenant lieu d’avis de cessation d’emploi, des prestations déterminées, des congés annuels accumulés, une indemnité de départ équivalant a 26 semaines de salaire et une lettre de recommandation.

Avant et apres sa cessation d’emploi, l’employée a demandé un exemplaire du régime d’équité salariale de l’employeur. Dans les deux cas, l’employeur n’a pas répondu. Meme apres que l’employée lui ait fait ces demandes, l’employeur n’a pas affiché son régime d’équité salariale. Conformément aux exigences de la Loi sur l’équité salariale, l’employeur était tenu d’établir ou d’afficher de son régime d’équité salariale au plus tard le 1er janvier 1990.

Aux termes de l’article 7 de la Loi, les employeurs ont l’obligation élémentaire d’établir et de maintenir l’équité salariale :

7(1) L’employeur établit et maintient des pratiques de rétribution assurant l’équité salariale dans chacun de ses établissements.

La Loi interdit également de déléguer cette obligation. En effet :

7(2) Il est interdit a l’employeur et a l’agent négociateur de négocier en vue d’obtenir l’établissement ou le maintien de pratiques de rétribution qui, si elles étaient adoptées, entraîneraient une contravention au paragraphe (1).

Peu de temps apres sa cessation d’emploi, l’employée a déposé une plainte aupres de la Commission de l’équité salariale, alléguant que l’employeur avait enfreint la Loi.

LE TRIBUNAL : NE PAS SE SERVIR DE LA COMMON LAW POUR REJETER LA LOI SUR L’ÉQUITÉ SALARIALE

La Commission a ordonné a l’employeur de payer plus de 56 000 $ a l’employée. L’employeur a interjeté appel aupres du Tribunal de l’équité salariale en lui demandant si la décharge que l’employée avait signée l’empechait de porter plainte aupres de la Commission.

Le Tribunal s’est prononcé en faveur de l’employée, pour deux raisons essentielles :

  • L’employeur ne s’était pas conformé a la Loi avant que la décharge ne soit signée;
  • La décharge ne précisait nullement le ou les droits auxquels l’employeur aurait souhaité voir l’employée renoncer aux termes de la Loi.

Le Tribunal a déclaré que le fait de ne pas se conformer a la Loi avait été fatal dans le cas de l’employeur et qu’il ne fallait pas recourir au principe de common law exigeant l’exécution des ententes pour priver de son but une loi, comme la Loi sur l’équité salariale. L’employeur a demandé que le Tribunal procede a une révision judiciaire de cette décision.

La Cour divisionnaire s’est prononcée en faveur de l’employeur. En confirmant la validité de la décharge, la Cour l’a décrite comme suit :

[TRADUCTION]] La décharge est breve, simple, sans équivoque et rédigée en termes généraux. On ne trouve aucune coercition ou contrainte dans sa présentation, et ses conditions ne sont ni oppressives ni injustes. Il n’y est nullement allégué que Mlle MacLean ne comprenait pas bien ou ne pouvait pas lire l’anglais, ou qu’elle n’avait pas signé la décharge librement et volontairement […] Selon nous, en lisant la décharge, il est clair que l’employeur a convenu de lui verser de l’argent et de lui donner certaines prestations et, en échange, elle a renoncé a toute autre demande d’indemnisation, y compris celles découlant des dispositions de la Loi. Autrement dit, la décharge signifiait littéralement et normalement que l’intention des parties était de renoncer entierement et définitivement a toute réclamation contre l’employeur.

La Cour a déclaré que les tribunaux se montrent fort réticents a annuler des ententes valides lorsque chacune des parties a reçu quelque chose d’important. Il y avait aussi des raisons de principe derriere le refus de faire du respect de la Loi une condition préalable a l’acceptation de la validité de la décharge : faire cela reviendrait a décourager le reglement efficace des différends en matiere d’emploi. Par ailleurs, le décharge de l’employée ne visait pas a dégager l’employeur de ses obligations aux termes de la Loi envers ses autres employées.

En conséquence, la demande de révision judiciaire a été acceptée et la décision du Tribunal a été annulée.

Notre point de vue

Cette décision sera bien accueillie par les employeurs qui veulent s’assurer que l’on maintienne les conditions d’ententes dument conclues, dans le cadre desquelles chacune des parties a obtenu quelque chose d’important. En l’espece, la Cour a pris le soin de faire la distinction entre les cas ou un employé convient de ne pas faire appliquer la législation sur l’emploi afin de régler un différend qui en releve et ceux ou des employés conviennent de céder leurs droits statutaires en ce qui concerne la durée de leur emploi ou une condition préalable a leur embauche. De meme, la Cour a fait valoir que la Loi elle-meme envisage des reglements exécutoires en ce qui a trait aux plaintes d’équité salariale.

Pour de plus amples renseignements, veuillez communiquer avec Carole Piette, au (613) 940-2733.

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