Le projet de loi C-86, qui a reçu la sanction royale le 13 décembre 2018, apportera d’importantes modifications au Code canadien du travail (le « Code »). Ces modifications, qui ne sont pas encore en vigueur, entreront en vigueur le jour que fixera le gouverneur en conseil, après que le gouvernement aura tenu des consultations sur la réglementation ce printemps et cet été. Les modifications se rapportent aux heures de travail et aux pauses, aux vacances, à l’égalité de traitement en fonction de la situation d’emploi, au préavis de cessation d’emploi et aux congés autorisés (pour de plus amples détails, voir Le gouvernement fédéral propose d’importantes modifications au Code canadien du travail dans le projet de loi C-86). Le projet de loi C-86 constitue une tentative de moderniser le régime fédéral en réponse à la nature changeante de la main-d’œuvre canadienne. Cette nature changeante serait caractérisée principalement par une augmentation du nombre d’emplois atypiques, temporaires et à temps partiel.
Les modifications prévues par le projet de loi C-86 découlent largement d’un rapport de consultation qui faisait ressortir les axes clés suivants :
- améliorer l’accès aux congés et aux vacances annuelles ;
- mieux soutenir l’équilibre entre travail et vie privée ;
- mieux protéger les employés qui occupent des emplois atypiques ;
- actualiser les dispositions relatives à la cessation d’emploi ;
- de bons salaires et avantages sociaux.
Outre les commentaires détaillés concernant les éléments énoncés ci-dessus, le rapport de consultation avait relevé certains enjeux déclarés comme étant si complexes qu’il y a lieu de leur consacrer d’autres études et consultations avant qu’ils fassent l’objet de modifications de nature à moderniser le Code. Il s’agissait des enjeux suivants :
- le salaire minimum fédéral ;
- les mesures de protection des normes du travail pour les travailleurs atypiques;
- la déconnexion des communications électroniques liées au travail après les heures de travail (parfois appelée le « droit à la déconnexion ») ;
- l’accès aux avantages sociaux et la transférabilité de ces avantages ;
- la voix collective des travailleurs non syndiqués.
Pour s’attaquer à ces enjeux, le gouvernement fédéral a formé un comité d’experts indépendant ayant pour mandat de les étudier et de mener des consultations et de formuler des conseils à leur égard.
Le Comité d’experts sur la modernisation des normes du travail fédérales
Les membres du comité possèdent un éventail large et diversifié de connaissances et de compétences en matière de politiques du travail, en droit et en sciences économiques. Le comité sera présidé par Sunil Johal, directeur des politiques au Centre Mowat, un groupe de réflexion sur les politiques publiques à l’Université de Toronto. Les autres membres du comité sont :
- Richard Dixon – cadre supérieur retraité en ressources humaines et en relations de travail ;
- Mary Gellatly – auxiliaire juridique communautaire de la Division des droits des travailleurs de l’organisme Parkdale Community Legal Services à Toronto ;
- Dalia Gesualdi-Fecteau – membre du Barreau du Québec et professeure à la Faculté de science politique et de droit de l’UQAM ;
- Kathryn A. Raymond, c.r. – associée principale du cabinet d’avocats BoyneClarke à Dartmouth, en Nouvelle-Écosse ;
- Craig Riddell – professeur émérite à la Vancouver School of Economics de l’Université de la Colombie-Britannique ;
- Rosa B. Walker – membre de la Première Nation Peguis du Manitoba et fondatrice, présidente et chef de la direction d’Indigenous Leadership Development Institute Inc..
Les cinq enjeux
Le Secrétariat du comité d’experts a préparé, pour chacun des cinq enjeux, un « document de discussion » pour présenter les renseignements pertinents s’y rapportant et pour stimuler la discussion au sein du comité. Chaque document de discussion décrit brièvement le contexte de l’enjeu et traite ensuite de certaines perspectives de recherche et des intervenants propres à l’enjeu. Dans certains cas, le document de discussion présente un aperçu de la situation dans différents ressorts et comment d’autres pays ont traité l’enjeu en cause. Chaque document de discussion conclut sur l’énoncé d’un certain nombre de questions sur lesquelles le comité devrait se pencher.
Le salaire minimum fédéral
Le salaire minimum fédéral est actuellement fixé au taux de salaire minimum de la province ou du territoire où l’employé exerce habituellement ses fonctions. Le comité est chargé d’examiner s’il convient de maintenir cette approche ou de rétablir un salaire minimum fédéral. À supposer qu’un salaire minimum fédéral soit rétabli, le comité doit songer au mécanisme législatif qui servirait à le fixer, à son montant en dollars et aux travailleurs qui y auraient droit. Le comité est aussi expressément chargé d’examiner la possibilité d’un salaire minimum fédéral de 15 $ l’heure, ainsi que la question de savoir si un taux horaire de cet ordre risque d’avoir des avantages ou des inconvénients disproportionnés pour qui que ce soit.
Les mesures de protection des normes du travail pour les travailleurs atypiques
Cet enjeu découle de l’augmentation du nombre d’emplois atypiques et du fait que les normes du Code s’appliquent principalement aux travailleurs se trouvant dans une relation de travail conventionnelle. Par conséquent, de plus en plus de travailleurs peuvent ne pas avoir accès aux mesures de protection prévues par le Code. Le comité examinera cet enjeu en abordant les questions suivantes :
- Qui devrait être protégé par les normes du travail fédérales?
- Les travailleurs atypiques devraient-ils être protégés par toutes les normes du travail ou uniquement par certaines normes du travail fédérales essentielles? Dans l’affirmative, quelles normes devraient s’appliquer?
- Faudrait-il examiner d’autres programmes fédéraux afin de mieux protéger les travailleurs atypiques?
La déconnexion des communications électroniques liées au travail hors des heures de travail
Cet enjeu vise tant les gestionnaires que les travailleurs. Les progrès technologiques et la popularité croissante des régimes de travail non conventionnels ont eu pour effet de brouiller les frontières entre le moment où les gens sont « au travail » et le moment où ils ne le sont plus. Le comité doit voir s’il s’agit d’un enjeu dans le secteur privé sous réglementation fédérale et s’il y a lieu de réglementer les communications électroniques liées au travail après les heures de travail. Dans l’affirmative, le comité se penchera sur les mécanismes optimaux pour le faire et sur leurs répercussions éventuelles sur la société, les entreprises et l’économie.
L’accès aux avantages sociaux et la transférabilité de ces avantages
Il s’agit d’un enjeu qui résulte au moins en partie de la montée des emplois non conventionnels. Les travailleurs qui occupent des emplois non conventionnels, ainsi que les travailleurs qui changent souvent d’emploi, peuvent ne pas avoir accès à divers types d’avantages sociaux, notamment les vacances, les congés autorisés et les avantages fournis par l’employeur, comme les régimes de soins médicaux et dentaires, les régimes de pension et les régimes enregistrés d’épargne. Le comité abordera les questions suivantes :
- Quels avantages sociaux devraient imposés par la loi ou universels? Lesquels devraient être facultatifs et pour qui?
- Qui devrait être responsable des avantages sociaux? Quels rôles devraient jouer le gouvernement fédéral, les employeurs, les travailleurs, les assureurs et les autres intervenants?
- Le gouvernement fédéral devrait-il prendre d’autres mesures pour accroître l’accès aux avantages sociaux et permettre leur transférabilité? Dans l’affirmative, y a-t-il des modèles précis à envisager et pourquoi?
- Le gouvernement fédéral devrait-il prendre d’autres mesures pour accroître la protection des avantages sociaux fournis par l’employeur dans le secteur privé sous réglementation fédérale? Dans l’affirmative, quelles mesures devraient être prises?
La voix collective des travailleurs non syndiqués
Les changements que vit la main-d’œuvre canadienne ne se limitent pas simplement à la montée des emplois atypiques. Au cours des dernières années, l’affiliation syndicale a diminué, les régimes de travail non conventionnels se sont répandus et un certain nombre de décisions judiciaires se rapportant au droit à la négociation collective ont été rendues. En raison de ces changements, le comité examinera si les travailleurs non syndiqués ont des avenues pour exprimer collectivement leurs points de vue sur les questions relatives aux normes du travail. Plus précisément, le comité se penchera sur la question de savoir s’il est nécessaire d’accroître les canaux portant une voix collective de cet ordre. Le comité déterminera si le Code comporte des lacunes ou des obstacles ayant une incidence sur la voix collective des travailleurs non syndiqués. Si tel est le cas, le comité examinera s’il y a lieu de remédier à ces lacunes ou obstacles, et comment s’y prendre.
À notre avis
Le comité doit faire rapport à la ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et du Travail d’ici le 30 juin 2019. Nous prévoyons que des détails concernant les consultations du comité seront communiqués dans un avenir très rapproché. Vous pouvez obtenir d’autres renseignements sur le comité, ses membres et son mandat, ainsi que sur les cinq enjeux, en cliquant sur le lien suivant : https://www.canada.ca/fr/emploi-developpement-social/campagne/groupe-expert.html.
Pour de plus amples renseignements, veuillez communiquer avec Sébastien Huard, au 613-940-2744.