Les dispositions sur le délai de prescription pour les autorités publiques ne s’appliquent pas aux « relations de travail courantes »

En vertu de la Loi sur l’immunité des personnes exerçant des attributions d’ordre public, les autorités publiques bénéficient d’une immunité spéciale contre toute poursuite intentée apres un délai de prescription de six mois. Par voie de comparaison, le délai de prescription habituel est de six ans. Cependant, comme l’illustrent deux décisions de la Cour supreme du Canada rendues le 17 septembre 1999, cette protection spéciale est limitée, plus particulierement dans les cas de conflit dans les relations de travail.

Le raisonnement de la Cour est plus détaillé dans l’arret Des Champs c. Conseil des écoles séparées catholiques de langue française de Prescott-Russell. Dans cette affaire, le plaignant était un surintendant de conseil scolaire qui, apres une réorganisation réduisant les responsabilités du conseil scolaire, avait été muté a un poste de directeur d’école.

Le Conseil a tenté de faire obstacle a l’action en invoquant le fait qu’elle avait été introduite apres le délai de six mois. Le Conseil a soutenu qu’il avait exercé les pouvoirs prévus par la loi, en l’occurrence le Reglement 309, pris en application de la Loi sur l’éducation, pour déclarer certains postes excédentaires afin de mettre en oeuvre un « plan de réorganisation a long terme du fonctionnement », et qu’il était par conséquent a l’abri d’une poursuite en vertu de la disposition sur le délai de prescription. M. Des Champs a fait valoir que sa réclamation ne touchait pas l’aspect public des pouvoirs et fonctions du Conseil.

La Cour supreme, par une majorité de six contre un, a permis a l’action de procéder. Toute action d’une personne exerçant un pouvoir public n’est pas nécessairement protégée par l’article 7 de la Loi sur l’immunité des personnes exerçant des attributions d’ordre public, a déclaré la Cour :

« L’expression [dans la Loi] « dans l’exercice ou en vue de l’exercice d’une fonction ou d’un pouvoir prévus par la loi ou d’ordre public » a pour effet de limiter la protection aux pouvoirs et fonctions de nature publique et permet de conclure, par inférence, qu’une autorité publique peut fort bien avoir d’autres fonctions ou pouvoirs qui sont essentiellement de nature privée. Pour distinguer ces éléments publics et privés, il faut, suivant le principe général, interpréter strictement le texte de l’art. 7 a l’encontre de la partie qui invoque la protection spéciale de cette disposition. »

Pour tracer la ligne de démarcation, les tribunaux doivent considérer non seulement la nature du pouvoir ou de la fonction prévu par la loi du défendeur et la mesure contestée par le plaignant, mais également le lien entre les deux. En l’espece, la réorganisation du conseil scolaire était bien une initiative d’ordre public, et le plaignant ne contestait pas la réorganisation comme telle, mais bien une décision accessoire et incidente aux fonctions publiques du Conseil.

Le Reglement 309, tout reglement qu’il soit, n’est qu’un « instrument de régie interne », de nature plus privée que publique. Ce serait une erreur, a conclu la Cour, d’accorder au Conseil une protection spéciale de prescription pour des « problemes courants de gestion et de relations de travail », simplement parce que l’employeur appartient au secteur public plutôt qu’au secteur privé.

Pour de plus amples renseignements, veuillez communiquer avec André Champagne au (613) 563-7660, poste 229.

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