L’Ontario introduit un modèle à « accès direct » pour traiter les droits de la personne

Le 26 avril 2006, le gouvernement ontarien a déposé le projet de loi 107, qui constitue une refonte du système des droits de la personne en Ontario. Le point principal de la nouvelle loi est qu’elle élimine les fonctions d’enquête et de tri qui relèvent actuellement de la Commission ontarienne des droits de la personne et qu’elle donne aux plaignants un accès direct au Tribunal ontarien des droits de la personne.

D’ENQUÊTEUR ET POURSUIVANT À PROMOTEUR DES DROITS DE LA PERSONNE

À l’heure actuelle, la Commission contrôle l’accès au Tribunal. Elle peut prendre jusqu’à un an pour débuter une enquête sur une plainte, et encore deux ans pour décider s’il faut renvoyer la plainte au Tribunal. Il faut parfois jusqu’à cinq ans pour que le cycle complet s’accomplisse. Les plaignants trouvent peut-être le système un peu lent dans son traitement des plaintes, mais ils ont l’avantage, si la plainte arrive au Tribunal, de faire prendre en charge la plainte par la Commission, et les plaignants n’ont généralement pas à engager leur propre avocat pour les représenter à l’audience.

Si le projet de loi est adopté, le rôle principal de la Commission sera d’assurer des fonctions telles que la défense des droits, la sensibilisation, la recherche et l’analyse des questions relatives aux droits de la personne. On donne également à la Commission un rôle spécial dans l’examen de la discrimination systémique dans la société et l’économie ontariennes, et dans l’élaboration de solutions pour parer à cette discrimination. Allant de pair avec cet aspect de ses fonctions, la Commission gardera la capacité d’entamer des procédures auprès du Tribunal lorsqu’elle est d’avis :

  • qu’il existe de la discrimination systémique qu’elle n’a pas été en mesure de corriger;
  • qu’une ordonnance du Tribunal corrigerait la discrimination systémique;
  • que la requête auprès du Tribunal est dans l’intérêt public.

Le projet de loi propose également d’établir au sein de la Commission un Secrétariat antiracisme ainsi qu’un Secrétariat aux droits des personnes handicapées. Ces deux nouveaux organismes seraient chargés de mener des recherches sur la situation des personnes handicapées et le racisme, de faire des recommandations en vue de prévenir les pratiques discriminatoires fondées sur un handicap ou le racisme, et de fournir au public des programmes de sensibilisation sur ces questions.

ACCÈS DIRECT AU TRIBUNAL

Si le projet de loi est adopté, la Commission cesserait de filtrer l’accès au Tribunal. Désormais, l’accès serait direct, de sorte que toute personne qui croit que ses droits ont été enfreints pourrait présenter une demande directement au Tribunal pour obtenir une réparation. Le Tribunal pourra adopter ses propres règles de procédure, y compris des règles qui prévoient dans quelles circonstances il n’est pas nécessaire de tenir une audition, qui limitent le droit des parties d’êtres entendues et qui visent l’utilisation de mécanismes de règlement des différends.

À l’heure actuelle, la Commission peut, pour certains motifs, rejeter une plainte sans tenir d’audition. Ces motifs ont généralement été maintenus pour ce qui est du pouvoir du Tribunal de rejeter une plainte sans procéder à audition. Le changement important à cet égard est que le Tribunal pourrait rejeter une plainte lorsqu’il est d’avis que la plainte a été traitée de façon satisfaisante dans le cadre d’une autre procédure. En vertu de la loi actuelle, la Commission peut refuser de renvoyer une plainte au Tribunal si elle est d’avis qu’il serait préférable que le problème soit traité en vertu d’une autre procédure légale, telle que l’arbitrage de grief.

La nouvelle disposition semble rétrécir la possibilité de rejeter une plainte, puisqu’à l’heure actuelle, la Commission peut rejeter une plainte même si le plaignant n’a pas eu recours au mécanisme qui paraît préférable à la Commission, ou que le plaignant a exercé ce recours et n’a pas eu gain de cause. Dans le nouveau système, la discrétion du Tribunal se limiterait aux cas où, selon le Tribunal, l’affaire a été traitée de façon satisfaisante ailleurs. Par conséquent, si l’arbitrage de grief est possible mais n’a pas été utilisé, le Tribunal ne pourrait rejeter la plainte pour ce seul motif.

On semble donner aux plaignants une multiplicité de recours, mais en même temps, le projet de loi interdit la poursuite a la fois devant le Tribunal et un tribunal judiciaire, lorsque l’action en justice cherche à obtenir des dommages-intérêts pour atteinte à la dignité, aux sentiments et à l’amour-propre. Cette interdiction n’existe pas à l’heure actuelle.

Le gouvernement a également annoncé son intention de créer un Centre de soutien juridique pour les plaintes en matière de droits de la personne pour ceux et celles qui s’adressent au Tribunal pour obtenir réparation. Toutefois, bien que le projet de loi comprenne des dispositions qui permettent au Ministre de conclure des ententes pour fournir et payer des services juridiques pour les requérants et autres parties aux procédures du Tribunal, il ne mentionne pas le Centre annoncé.

Notre point de vue

Le projet de loi est passé en deuxième lecture le 6 juin, et le gouvernement a annoncé un processus de consultation publique, comprenant un comité consultatif de mise en œuvre pour conseiller le gouvernement sur le projet de loi. Certains ont observé qu’en plaçant les audiences publiques après la deuxième lecture, on restreint le débat sur le projet de loi. Et les groupes de revendication et les groupes d’intimés (qui incluent les employeurs) avaient exprimé leur frustration à l’endroit du lourd processus de la Commission. Cependant, il est probable que les groupes de revendication s’inquiéteront davantage du fait que le nouveau système éliminera le rôle d’enquêteur de la Commission ainsi que la prise en charge par la Commission d’une plainte renvoyée au Tribunal.

Pour de plus amples renseignements, veuillez communiquer avec André Champagne au 613-940-2735.

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